Saint-Michel, « un patchwork multiculturel » Imprimer
Mercredi, 09 Mars 2016 06:00

Depuis 1971, il a bien bourlingué partout en ville, Jean-Pierre Terracol avec sa Cie L’Œil : près de la gare Saint-Jean, puis rue des Bahutiers à Saint-Pierre et l’Entrepôt Lainé avant qu’il accueille le CAPC… L’ouverture de la Lucarne, rue Carpenteyre, en 1983 fait de lui l’un des doyens de la vie culturelle du quartier.

 

L’auteur Michel Suffran, un fidèle du lieu, continue de lui adresser ses lettres à « cette petite Lucarne qui brille sur Saint-Michel ». Longtemps, la Lucarne a brillé seule dans ce quartier alors peu pourvu en équipements culturels (le TnBA n’ouvrira qu’en 1986 au bout de la rue Camille-Sauvageau). Qu’est-ce qui a pu pousser le metteur en scène à transformer un grand garage en théâtre ? Le maire d’alors, Chaban-Delmas. « Chaban m’avait dit “tu vas voir, bientôt ce sera le quartier culturel par excellence”. Il avait totalement raison. Le TnBA, les Beaux-Arts, le Café Pompier, la foule de petits lieux de concerts et de galeries, toutes ces compagnies implantées ici… C’est devenu LE quartier de tous les arts vivants. »

« Un patchwork multiculturel », une « multiculture » comme il aime à dire, qui colle bien avec les valeurs qu’il veut défendre avec son lieu réhabilité récemment par la Ville. « Nous sommes sans cesse en recherche d’idées neuves pour brasser plus les arts (ce que nous faisons lors de nos soirées “Clin d’Œil”), croiser toutes les cultures, toujours surprendre et apprendre au public, à tous les publics, à être curieux. Je rêve d’accueillir dans cette Lucarne – je leur lance d’ailleurs ici un appel – toutes les jeunes compagnies de tout Bordeaux. »

Mais à l’heure d’Internet et des réseaux sociaux, cet ardent « défenseur de l’oralité » voit aussi le rôle de proximité de la Lucarne. Ainsi, ces ateliers menés avec l’association interculturelle voisine Promo Femmes qui aide les femmes en situation de migration d’une soixantaine de pays. Ou ces “Kastings Kartier” qu’il veut remettre au programme de la saison prochaine, des scènes ouvertes à tous les talents du quartier. « Je trouve que les gens ne sont pas encore assez impliqués dans cette multiculture, alors j’espère que ce genre d’initiatives les aidera à se sentir plus impliqués. »

Avec plus de 30 ans de vie micheloise au compteur, il savoure toujours d’être au cœur de ce « quartier très ouvert, un peu foutraque ce qui fait qu’on invente », de cette « communauté de vie et d’échange qui en fait sa particularité et sa richesse ». Même si le quartier change ? « Jusqu’ici, il n’a pas changé du tout ! L’autre jour, au premier rayon de soleil, j’ai pris un thé à la menthe et une corne de gazelle sur la place, c’était divin ! » •

Sébastien Le Jeune

Entrée désormais par le 1, rue Beyssac. www.theatre-la-lucarne.com

Photo : Jean-Pierre Terracol : « Saint-Michel est devenu le quartier de tous les arts vivants. » © Philippe Taris / sud Ouest