St-Pierre et St-Eloi : Allez les Filles "Robin des bois du rock'n roll" Imprimer
Jeudi, 07 Juillet 2016 06:00

ALF-Vidal3721-SLJDes concerts toute l’année, Relâche en été, des Funky Kids, des siestes soul, des “Dancing in the street”, des “Soul tram”... Tout ça, c’est signé Allez Les Filles, dont le local est situé au 9, rue Teulère. Rencontre avec son boss, l’inénarrable Francis Vidal. 

Pourquoi avoir choisi le quartier Saint-Éloi ?

Un peu parce que j’y ai grandi. Quand je suis arrivé à Bordeaux, en 1954, j’avais 5 ans, on vivait rue Buhan, et j’allais à l’école Paul-Bert. Et c’est dans cette même rue que je vis à nouveau depuis deux ans, après plusieurs années à Saint-Michel. À l’époque c’était le bazar, entre les commerçants – beaucoup de grossistes, en habillement surtout – qui attiraient des gens de bien au-delà de Bordeaux, les marchés cours Victor-Hugo et place de la Ferme-de-Richemont (avant qu’on y mette le Palais des sports), c’était dur de circuler – c’était intense, cours Victor-Hugo – et quasi impossible de stationner.

Pour cette raison, les grossistes ont fini par partir, pas mal vers Bordeaux-Nord. Ça a fait un grand vide, et on a tout de suite senti que, avec ses loyers modiques, ça allait devenir le quartier parfait pour les associations et les commerces un peu à part, c’était dans l’air. De fait, parmi les assos, on a été dans les premiers à s’installer en 1996, juste après L’Assiette musicale.

Comment trouvez-vous le quartier aujourd’hui ?

Dans l’ensemble, ça va. Les places sont bien refaites – fallait voir la place Lafargue, c’était ignoble avant. Mais, bon, le quartier est devenu cher et tout est à peu près pris alors, côté assos, ça ne devrait plus trop bouger. Et puis je continue d’aller dans les “vieux trucs”, comme le Saint-Christophe rue Saint-James, je n’aime pas trop le “neovintage”... Vous savez, dans les années 1970, il y avait ce groupe, Devo. Une abréviation de “dévolution”, ce qui vient après le sommet de l’évolution. Moi j’y crois, les villes, moins, elles voudraient que tout évolue tout le temps. 

Quarante ans bien frappés de musique dans les bottes, dont 20 ans d’Allez Les Filles : la passion est intacte ?

Oui elle est toujours là, réelle et profonde. C’est qu’elle m’a sauvé la vie, la musique. Il m’a fallu du temps pour tenter le coup, essayer de vivre de la musique et des choses en rapport. J’ai commencé en passant des disques au Luxor quand j’étais encore représentant de commerce, et c’est grâce au patron que je suis devenu programmateur, au Jimmy, à Barbey, puis avec Allez Les Filles. 

La musique, c’est un langage et, moi, je parle avec mes concerts. En trois minutes, voire moins, la musique vous permet de transformer les gens. Au fil du temps, avec l’asso, on a affirmé notre patte, essayé d’être élégants et de proposer des esthétiques variées. La grande réussite, c’est Relâche : avec les concerts gratuits, on voit plein de gens qui ne savent pas ce qu’est une salle de concert, ni même un concert, on réunit des jeunes, des vieux. Et pourtant on peine à en vivre, parce que les gens qui nous gouvernent ne nous aident pas à la hauteur de ce qu’on devrait être. Je suis un peu comme le Robin des Bois du rock’n’roll...

Pourtant, vous me parliez il y a peu d’arrêter les concerts l’hiver...

En effet, c’est prévu. D’abord pour réfléchir, faire un vrai bilan de Relâche et voir où on va après. Quand on a commencé, on était parmi les seuls, aujourd’hui, il y a une cinquantaine de clubs et autres lieux, et encore plus d’acteurs culturels, qui font des concerts – trop, à mon avis, avec là-dedans beaucoup de “wannabe” et de businessmen. Nous on veut faire ce que les autres ne font pas, quel intérêt sinon ? On a muté sans arrêt, et les idées ne manquent pas, on n’est pas inquiet.  

Recueilli par Sébastien Le Jeune

Relâche, c’est parti pour deux mois : le programme sur allezlesfilles.net