Après Ginko et les Bassins à Flot, avant Niel et Garonne Eiffel, voici le nouveau quartier à naître de Bordeaux. Le projet Brazza vient de connaître une avancée décisive avec la désignation des aménageurs d’un premier îlot de 2,7 hectares.

Ce secteur dit "Brazza" est situé le long du quai du même nom, entre le débouché du pont Chaban-Delmas et, plus haut, les installations de l’entreprise de construction de bateaux CNB. Aujourd’hui secteur largement industriel, associant friches et entreprises en activité, il deviendra d’ici quelques années un quartier bordelais à part entière.
Comme pour les Bassins à Flot (avec Nicolas Michelin), un urbaniste a été choisi par la Ville pour y définir un «plan guide» et encadrer les projets de construction qui seront amenés à y voir le jour. Youssef Tohmé a déjà dessiné les grandes lignes de ce futur quartier. Mais la désignation d’un premier groupement d’aménageurs va maintenant faire entrer le projet dans le concret. Ce groupement baptisé Studio Brazza associe des promoteurs, une banque, un bailleur social... et se voit confier un îlot situé sur l’emprise de l’ancienne usine Soferti, le secteur situé le plus en aval, près de CNB.

Créer des «espaces capables»
Le projet prévoit la construction d’environ 400 logements (sur 8000 pour l’ensemble du secteur Brazza), qui seront en grande partie des «espaces capables». C’est à dire des appartements et des maisons qui seront livrés en plateaux inachevés. En dehors des murs et des canalisations, tout ou presque sera à faire. Charge aux acheteurs de terminer les travaux de la façon et au rythme qui leur convient.
C’est une volonté de la ville, imposée aux promoteurs dans le cadre de la procédure d’urbanisme négocié. Principal avantage : proposer des prix abordables et cibler les propriétaires occupants plutôt que les investisseurs. « C’est aussi un moyen de sortir d’un certain type de logements très stéréotypés », explique Elisabeth Touton, adjointe au maire de Bordeaux en charge de l’urbanisme et du logement. Plus globalement, le projet de Youssef Tohmé prévoit un urbanisme largement horizontal (peu d’étages dans les bâtiments), des rues pavées avec des «échoppes du XXIe siècle» que chacun sera donc invité à personnaliser.

Deux hôtels, du sport indoor
Sur cet îlot Soferti, il est aussi prévu de conserver une large place à l’activité économique. La ville travaille avec la Chambre des Métiers sur le moyen d’y encourager l’installation d’artisans. Situé non loin, le magasin Point P restera là et créera même une grande école de formation pour les artisans du bâtiment. Quant à la grande halle de l’ancienne Soferti, elle sera conservée, réhabilitée et accueillera une activité qui reste à définir (de l’agriculture hors sol ?). Le projet prévoit aussi l’installation de deux hôtels : un établissement à mi-chemin entre la résidence hôtelière et l’auberge de jeunesse, porté par un opérateur américain et un hôtel plus branché, type Mama Shelter, mais dans les deux cas destinés aux budgets modérés. Ce premier îlot accueillera aussi un complexe de sports et loisirs indoor. Les discussions sont encore en cours, mais on parle déjà d’un projet aquatique de surf indoor.
Enfin, une large place sera accordée aux espaces verts, dont certains assez atypiques. Michèle Larüe-Charlus, directrice générale de l’aménagement de la ville de Bordeaux, n’hésite ainsi pas à comparer la voie ferrée qui longe les terrains au nord à la «High Line» de New-York, une ancienne voie ferrée reconvertie en parcours de balade en plein coeur de la ville. Avec la différence que la voie bordelaise est encore active : elle est empruntée une fois par semaine, par le train qui livre les Moulins de Paris en farine. Pas de quoi empêcher son appropriation par les riverains le reste du temps. La comparaison est en tout cas séduisante, et traduit l’ambition urbanistique de la ville pour ce secteur hors normes.• 
Sophie Lemaire

 Photos : © Y.Tohmé Architects & Associates