Comment faisait-on avant la création d’internet, des tablettes tactiles et autres smartphones ? Pour les plus jeunes, qui ont baigné dans les nouvelles technologies dès le berceau, la réponse à cette question reste un véritable mystère.

Car aujourd’hui, les enfants sont connectés, surfent comme d’autres téléphonent. Mais s’ils maîtrisent l’outil, souvent bien mieux que leurs parents, ils n’ont pas toujours conscience des risques qu’ils encourent sur une toile aussi riche et tentaculaire qu’impénétrable.
Pour leur apprendre les bons réflexes et les écueils à éviter sur le web, la brigade de prévention de la délinquance juvénile (BPDJ) de la gendarmerie nationale a expérimenté cette année un nouveau concept à destinations des enfants des classes de CM2, le « permis internet.» « On s’est rendu compte que la prévention sur les risques d’internet pour les enfants doit se faire de bonne heure, explique Sonia Bendelaïd-Cazenave, commandant de la BPDJ de Bordeaux-Mérignac. Ils sont nés avec ces technologies, pas leurs parents qui parfois se sentent dépassés par l’outil et laissent faire les enfants seuls. En CM2, ils ont assez de maturité psychique pour apprendre comment naviguer en toute sécurité.»

Une formation en trois temps
En Aquitaine, l’expérience s’est déroulée durant l’année scolaire à Martignas-sur-Jalle. Dans les écoles Aimé Césaire et Jean de La Fontaine, 91 enfants ont suivi le programme et hier soir, lors d’une cérémonie très officielle, leurs précieux permis leur ont été remis : « la formation s’est déroulée en trois temps, poursuit Sonia Bendelaïd-Cazenave. Nous avons d’abord présenté les outils aux directeurs et enseignants, à qui nous avons remis un kit pédagogique. Puis nous avons expliqué aux enfants comment se passe le permis. Ensuite, ce sont les professeurs qui seuls animent des séances sur le sujet. Enfin, lorsqu’ils estiment que les enfants sont prêts, un gendarme vient et fait passer l’examen. C’est un questionnaire à choix multiples qui comporte dix questions.»

« Se faire respecter »
Dans la plupart des familles présentes hier soir, les risques liés à internet semblaient déjà bien identifiés. Souvent, au sein de la cellule familiale, la prévention est déjà de mise : « on l’avait prévenue mais je trouve bien de le faire aussi à l’école, affirme Solène Hascoet, maman de Manon, 10 ans. L’inquiétude, c’est par exemple que des personnes plus âgées prennent contact avec elle.» « Ils nous ont dit d’utiliser un pseudo qui ne donne pas de renseignement sur nous, de ne pas aller sur des sites qui ne sont pas de notre âge, de ne pas parler à des inconnus », raconte la jeune fille. « J’ai appris qu’on peut "casser" un ordinateur à distance, se faire pirater, ajoute son amie Lilou. Il ne faut pas donner d’informations sur soi ou donner son mot de passe quand on est sur un jeu.»
« On leur apprend à utiliser l’outil multimédia en respectant tout le monde, reprend le commandant de la BPDJ. Ce n’est pas parce qu’il n’y a personne en face que l’on doit faire n’importe quoi. Le corollaire, c’est qu’ils doivent aussi se faire respecter, se protéger en ne donnant pas d’informations personnelles, intimes ou des photos. Et enfin, ne pas commettre d’infractions via des insultes, discriminations ou en diffusant des photos prises à l’insu d’une personne.»
Dès la rentrée prochaine, l’expérience du « permis internet », visiblement concluante, va être étendue à l’ensemble des établissements scolaires qui le désirent. •

Olivier Saint-Faustin

Photo : 91 enfants de 9 à 11 ans des écoles de Martignas-sur-Jalle ont obtenu leur permis internet © OSF