Le directeur de l’office de tourisme de Bordeaux Nicolas Martin, qui a pris les rênes de l’office il y a 18 mois, est un homme chanceux : Bordeaux est une destination qui a la cote. 

En 10 ans, accompagnant la transformation de la ville, la fréquentation touristique aurait quasiment doublé, selon les estimations de l’office. Soit 5 millions de visiteurs par an, dont 60% pour du tourisme d’affaires (congrès). Et cela n’est pas fini, disent les projections. Cela ne veut pas dire que les "ambassadeurs" de Bordeaux n’ont pas encore quelques défis à relever dans la compétition internationale des destinations touristiques. Entretien.

Bordeaux, c’est la ville à la mode ?

Oui c’est vrai, on le voit dans tous les classements qui se succèdent… Et c’est étonnant de voir que les Bordelais en sont fiers désormais. Il y a 15 ans il était de bon ton de dire que Toulouse c’était terrible alors que Bordeaux c’était la "loose". La tendance s’est complètement inversée. L’important pour nous maintenant c’est de pérenniser pour qu’il y ait un vrai positionnement de Bordeaux comme une des grandes métropoles touristiques européennes, comme Barcelone, Amsterdam… On a un produit fabuleux en effet, d’autant plus si on rajoute dans deux ans la Cité des Civilisations du Vin, dans trois ans le TGV qui nous mettra à deux heures de Paris… cela offre des perspectives ! La Cité du vin, incontestablement, cela va devenir le monument emblème. On a la place de la Bourse ou le Grand Théâtre, mais ils  nous manquait un Guggenheim, une Tour Eiffel, un Opéra de Sidney... un monument emblématique qui nous identifie tout de suite. Vu la beauté du bâtiment et son emplacement près du pont Chaban… Imaginez le spectacle, notamment pour les bateaux de croisière qui arriveront en ville, ce sera extraordinaire !

Ces bateaux seront nombreux dans trois ans, au rythme où les croisières fluviales progressent...
Aujourd’hui il y 4 bateaux et ils sont complets toute la saison. On sera à 10 bateaux minimum dans les 3 ans. C’est intéressant car contrairement aux croisières maritimes, cela génère une vraie économie locale toute l’année. Et c’est une clientèle différente, assez âgée en général, des Anglo-saxons souvent, qui choisissent leurs vacances sur catalogue auprès de leur compagnie de croisière. Ils ne seraient pas venus sans cela.

Le "marché" est-il suffisant pour dix bateaux ?  
Ailleurs cela fonctionne : à Lyon il y a 17 bateaux sur le Rhône et la Saône, sur le Rhin encore plus...  On est très étonné nous Bordelais car on trouve que la Garonne n’est pas forcément le fleuve le plus glamour qui soit. Mais ces gens ne viennent pas pour le paysage. Il viennent pour Bordeaux et pour visiter les châteaux.

Quels sont les défis qui se présentent à vous aujourd'hui ?
Sur les marchés lointains, convertir la notoriété du vin de Bordeaux en intention de visite touristique, expliquer que Bordeaux est aussi une destination. Quand des Chinois ou des Japonais viennent en Europe, ils font souvent Italie-Suisse–France avec la French Riviera, Paris et éventuellement le Mont Saint Michel. Il faut réussir à les détourner et positionner Bordeaux comme un incontournable.
Sur les marchés européens, le défi est de réussir à développer les vols directs vers les grandes villes car l’effet est immédiat. On l’a vu récemment avec des lignes vers la Suisse : la clientèle explose littéralement. L’aéroport s’y emploie, mais ça n’est pas facile. Il faut rendre Bordeaux suffisamment attractive pour qu’une compagnie qui hésite entre deux villes nous choisisse. On a réussi à le faire récemment avec Istanbul, mais c’est difficile face à des villes dotées de grosses structures qui font tout leur marketing, et pas seulement pour le tourisme. «IAmsterdam» en est le meilleur exemple. Nous n’en sommes pas encore là ! •

Recueilli par Sophie Lemaire

Photo : Arrivé il y a 18 mois, Nicolas Martin a notamment lancé au printemps un "citypass" et une "box" destinés aux touristes © office du tourisme de bordeaux