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Construire un grand stade à Bordeaux, dans une période où les collectivités locales doivent se serrer la ceinture sur le plan financier, était-ce vraiment une bonne idée ?
Dès le début du projet, des oppositions s’étaient exprimées. Et ces derniers jours, le maire Alain Juppé, qui a décidé d’édifier cette nouvelle enceinte de 185 M€ dans le quartier du lac, a donné pas mal de grain à moudre à ses contradicteurs.
900 M€ de bénéfices pour l’UEFA... Et rien pour la ville Lors d’une conférence organisée dans le cadre d’Agora, vendredi dernier, l’édile bordelais s’est ouvertement interrogé sur la pertinence économique de ce choix. Ses propos ont été rapportés par le quotidien Sud Ouest : « ai-je bien fait quand j’ai décidé en 2008 de lancer la construction de ce stade ? En 2008 le contexte budgétaire était différent...» Puis ce week-end, on apprenait, toujours dans le quotidien régional, que lors d’une rencontre jeudi à l’Elysée concernant l’Euro 2016, en présence des maires des villes hôtes et du président de l’UEFA Michel Platini, Alain Juppé et le dirigeant de l’instance européenne auraient vivement échangé au sujet de la répartition des retombées économiques de la compétition. La pomme de discorde ? L’UEFA empochera environ 900 M€ quand les villes, malgré de conséquents investissements, ne toucheront pas un centime... Le maire aurait alors demandé que les communes touchent une petite part de ces bénéfices, requête à laquelle Michel Platini aurait opposé une fin de non recevoir. Résultat : une discussion « un peu tendue » qui « ne s’est pas très bien passée », selon l’ex-premier ministre.
Juppé « prépare les consciences » A la lecture de ces déclarations, l’élu socialiste Matthieu Rouveyre, pourfendeur attitré du projet de stade à la mairie de Bordeaux, s’est réjouit de constater « qu’Alain Juppé nous rejoint sur les positions que nous défendons depuis plusieurs années.» « Il prépare les consciences à de futures décisions, développe-t-il. Réclamer des contreparties, c’était le minimum mais il aurait fallu un rapport de force préalable. Rien n’a été anticipé. Juppé est dans la préparation du budget 2015 et il se rend compte qu’un loyer de 6,5 M€/an pour le stade, ça ne rentrera pas. Il est intelligent et il est conscient de cette situation. Il n’a pas lâché ça sur un coup de fatigue.» L’élu PS s’amuse ainsi à se livrer à un exercice « divinatoire » dans lequel il imagine trois futures décisions du maire : d’abord la volonté de transférer la gestion du nouveau stade à la CUB, la ville ne pouvant assumer seule le loyer. Puis une augmentation des impôts locaux à Bordeaux pour faire face à ce loyer et aux autres frais dont la municipalité doit s’acquitter. Enfin, Matthieu Rouveyre envisage une défaillance du club des Girondins de Bordeaux, qui lui aussi devra payer un loyer annuel de l’ordre de 3,85 M€. Dans cette hypothèse, il imagine le maire baisser la redevance réclamée au club et faire supporter le manque à gagner au contribuable bordelais. Ce dernier n’a plus qu’à espérer que l’élu Rouveyre soit une piètre Mme Irma. •
O. Saint-Faustin
Photo : Le nouveau stade, dans le quartier de Bordeaux lac, sera inauguré en mai prochain © SBA |