Télécharger Bordeaux7

L'édition PDF est mise en ligne tous les matins à partir de 7 heures. Cliquez sur l'image pour télécharger l'édition du jour.

Météo de Bordeaux

Newsletter

Retrouvez-nous sur :

Facebook
Twitter
Flux RSS

Mahmoud Doua : "Les imams doivent se rendre compte de l'impact de leurs discours" PDF Imprimer Envoyer
Lundi, 16 Novembre 2015 17:17

MahmoudDoua REwebMahmoud Doua, imam de Cenon, participait ce midi à la minute de silence organisée devant l'Hôtel de Ville, aux côtés des représentants locaux des autres religions et du maire de Bordeaux Alain Juppé. Il a rappelé un message déjà exprimé par Tareq Oubrou (grand imam de Bordeaux) après les attentats de janvier : les membres de la communauté musulmane doivent exprimer ostensiblement leur rejet des actes commis au nom de leur religion. Et nos imams doivent oeuvrer à la déradicalisation. 

 

Quel est le message que vous entendez passer à vos fidèles aujourd’hui ?
D’abord, leur dire qu’ils doivent sortir dans la rue et montrer de manière ostentatoire qu’ils se démarquent de ces actes criminels. Mais le message s’adresse aussi aux religieux, aux imams : il faut qu’ils se rendent compte de la responsabilité qu’ils ont via les discours qu’ils tiennent dans les mosquées. Parce que malheureusement il y a une misère sociale dans notre population, et ces terroristes recrutent dans cette misère au nom de la religion. Et cela n’est pas fini : tant qu’il y a ces lignes de positionnement géopolitique au Moyen-Orient ou en Afrique, tant qu’on est dans cette phase sismique sur le plan géopolitique, nous serons confrontés à ces problèmes.

Quelle est votre marge de manœuvre localement, par rapport à des enjeux qui se déroulent ailleurs dans le monde ?
Notre priorité est d’abord de mettre la communauté musulmane à l’abri de ce discours d’instrumentalisation. Premièrement, en insistant sur les discours dans les mosquées : il faut que les fédérations représentatives des mosquées se réunissent et se mettent d’accord sur la formation des imams. Deuxièmement, au niveau des enfants et de la transmission de la religion. Et troisièmement au niveau de l’opinion publique. Par exemple, l'école de la République a un rôle a jouer par l’enseignement du fait religieux. Il ne s’agit pas d’enseigner la religion ni de faire du catéchisme. Mais les gens aujourd’hui sont dans l’illetrisme religieux. Or la religion est un besoin anthropologique, on ne peut pas l’ignorer. Ca n’est pas forcément à nous, les religieux, d’intervenir dans les écoles, mais il faut intégrer cela dans les cours d’histoire ou mettre en place des visites dans les lieux de cultes. Il faut expliquer l’origine commune de nos religions, nos valeurs communes, et que l'on ne peut pas tuer au nom de Dieu.

Etes-vous confronté ici à ces problèmatiques de radicalisation ?
En Gironde, l’immense majorité est un islam modéré, très spirituel. Mais on constate aussi dans nos mosquées un certain islam littéraliste (très proche des textes dans leur sens premier, ndlr), donc il est de notre devoir de leur expliquer et de leur commenter l’esprit de cette religion, qui est une religion d’apaisement et de paix. Et puis il y a quelques individus, qui généralement ne fréquentent pas la mosquée, mais que nous allons voir chez eux. Ce sont des jeunes perdus, qui se sentent rejetés par la société, ne se sentent pas français… Et qui sont récupérés via internet. Ces individus existent et c’est très difficile de les remettre dans le droit chemin parce qu’ils ont d’abord une haine. Avant d’être musulmans ou de citer le Coran, ils ont d’abord de la haine, ils portent une violence en eux. La religion ne sert qu’à l’exprimer. A Bordeaux nous avons mis en place, avec la Ville et la Préfecture, un centre de déradicalisation où l’on trouve des psychiatres, des psychologues, des éducateurs, des imams. Les cas qu’on a eu à y traiter sont essentiellement, avant tout, des cas psychiatriques, ils sont avant tout malades. Mais le religieux a rôle important car c’est via le vocabulaire religieux qu’ils expriment leur haine. Il faut donc déconstruire le discours religieux qui les a endoctrinés, donner une contre-argumentation religieuse. Et il faut surtout intervenir avant qu’ils ne partent à l’étranger, où ils sont endoctrinés. Sinon, c’est trop tard.
 
Le gouvernement parle de fermer certaines mosquées radicalisées...
Oui, on le dit depuis très longtemps ! Si il y a un discours, un prêche qui perturbe l’ordre public et appelle à la violence, il est du devoir de l’Etat d’empêcher ces imams - qui ne sont d’ailleurs souvent que des imams autoproclamés - de tenir ces discours. Cela a été fait à Bègles. Aujourd’hui il y a un manque de salles de prière pour les musulmans, c’est un problème. Mais il ne suffit pas d’ouvrir une salle ou de construire une mosquée, il faut savoir qui va la gérer. Nous, à la Fédération des Musulmans de la Gironde, nous sommes prêts à prendre ces salles en charge. Nous savons qu’il y a actuellement deux ou trois salles qui posent problème en Gironde. On les connaît. Les imams qui y prêchent ne sont pas forcément des radicaux, mais leurs discours sont littéralistes. Et s’ils sont écoutés par des gens qui sont déjà dans la violence ou dans la haine, cela peut avoir des conséquences.•  Recueilli par Sophie Lemaire

 

 

 

La Une du jour

Newsletter

Copyright © 2024 CNEWS Matin Bordeaux7. Tous droits réservés.