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Avec les Roms, Bègles « ne sait plus comment faire » PDF Imprimer Envoyer
Jeudi, 06 Mars 2014 07:00

Derrière les rires et les sourires, une profonde détresse. Hier, sous un ciel enfin clément, la vie suivait tranquillement son cours au 172 de la rue des 4 Castéra, à Bègles. Depuis quelques mois, cet ensemble de bâtiments désaffectés accueille le plus gros squat de la ville.

 

Des enfants jouent, font du vélo, des femmes font la lessive au grand air. Des scènes banales de la vie quotidienne pour la petite cinquantaine de Roms Bulgares qui vivent ici, dans des conditions d’hygiène et de sécurité plus que précaires.
Kalinka, 12 ans, joue les traductrices dans un français balbutiant. Par son intermédiaire, l’une des femmes explique que certains parviennent parfois à trouver du travail mais que la manche est la principale source de revenu. Avant de « s’installer » à Bègles, elle vivait à Floirac. Ce dernier squat, comme plusieurs autres dans l’agglomération, à l’image de celui emblématique de l’avenue Thiers, à Bordeaux, a été fermé l’an dernier. Il a fallu bouger, et la solution béglaise s’est imposée d’elle-même.



Une population de 200 Roms

Aujourd’hui, cette commune concentre « plus de 45% de la population Rom dans la CUB », affirme la préfecture de la Gironde, qui estime que 460 citoyens bulgares ou roumains sont actuellement installés dans l’agglomération. « Nous avons constaté une arrivée massive de cette population à peu près au moment de la fermeture du squat de l’avenue Thiers, confirme Alain Pérez, l’adjoint au maire de Bègles en charge de l’action sociale et du logement. Forcément, les gens ont cherché à aller ailleurs et Bègles a décroché la timbale. On a plus de la moitié des Roms qui sont partis des différents squats qui ont débarqué ici.»

En septembre dernier, près de 180 Roms, répartis sur une dizaine de squats, ont été recensés à Bègles, mais ils seraient « près de 200 » aujourd’hui. « La difficulté, c’est que ce sont des gens qui bougent et qui vont d’un squat à l’autre, poursuit l’élu. Ce qui est valable un jour ne l’est plus le lendemain.»



L’« aspirateur » béglais

Pourquoi ces populations ont-elles privilégié cette petite ville de 25 000 habitants ? Selon l’adjoint au maire, la politique « humaine » que pratique la commune sur le plan social a créé un « appel d’air » : « nous jouons le rôle d’un aspirateur et aujourd’hui, on a dépassé les limites du raisonnable, explique-t-il. On ne peut plus aider autant qu’on a pu le faire par le passé, on ne peut pas continuer à ouvrir nos portes à des gens qui sont dans la difficulté. On est peut-être un peu plus "humain" ici à Bègles, mais on ne voudrait pas que de ce fait on devienne un véritable "aspirateur" de toutes les autres communes.»

Car cette solidarité à un coût non négligeable pour la Ville. S’il ne communique aucun chiffre, Alain Pérez, par ailleurs vice-président du Centre Communal d’Action Sociale (CCAS) de Bègles, avance que l’ensemble des aides accordées a augmenté « de 28% en 2013. Cela représente un accroissement de 22% du coût de l’aide alimentaire et de 48% pour l’aide financière. C’est considérable et c’est évidemment en partie lié à ces arrivées massives. On a été obligé de demander une subvention supplémentaire à la mairie, qui donne déjà plus de 800 000€ par an au CCAS.»

Cette nouvelle population impacte également le fonctionnement des écoles, où 32 enfants Roms sont scolarisés : « le problème, c’est qu’ils ne parlent pas français donc les enseignants sont dépassés par les événements, souffle Alain Pérez. On est obligés de payer des interprètes pour pouvoir communiquer avec eux. Ces dépenses supplémentaires se rajoutent à d’autres et on ne sait plus comment faire...»



Un problème d’agglomération

La situation béglaise est bien connue des services préfectoraux et des autres villes de la CUB. La semaine dernière, lors d’une table ronde organisée à la préfecture pour faire le point sur la situation des squats dans l’agglomération, le préfet a annoncé qu’une « réunion spécifique » sur la situation béglaise serait prochainement organisée. La CUB, par la voix de son président Vincent Feltesse, a également souhaité que « face au phénomène de diffusion des squats en périphérie », une plus grande attention soit portée aux « communes concernées.»

Car le problème, aujourd’hui, concerne l’ensemble de l’agglomération. Et à Bègles, on regrette que tout le monde se passe la patate chaude : « le problème, c’est que ces populations ne sont pas réparties dans l’agglomération, continue l’adjoint au maire béglais. Il faudrait un équilibre. On ne refuse pas d’aider mais il arrive un moment où on ne peut plus… Dans certaines communes, que je ne vais pas citer, on n’hésite pas à demander des expulsions et la libération des squats. Après, ce sont les autres qui trinquent. Chez nous, tant qu’il n’y a pas de demande d’expulsion de la part des propriétaires, ce n’est pas nous qui allons les engager. Le problème, c’est qu’en disant cela, les gens vont se dire qu’ils seront tranquilles s’ils viennent ici... Et plus on va aider, plus on joue un rôle d’aspirateur. On est pris à notre propre piège...» •


Olivier Saint-Faustin

Photo : La ville de Bègles concentre aujourd’hui « plus de 45% » des populations Roms de la CUB © OSF

 

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