«Chauffeur de bus le jour, humoriste la nuit» : derrière cette punchline, se cache Sofiane Ettaï, 30 ans, un vrai conducteur de tram et de bus chez Keolis, qui se lance dans le stand up avec «Chauffeur d’abus». Il joue désormais une fois par mois au Chat gourmand. Entretien.


Quand vous est venue cette idée d’écrire un spectacle de stand up ?

Disons que, depuis tout petit, j’ai toujours été le “rigolo de service”, en classe et ailleurs. Sortir le bon mot au bon moment, du tac au tac, c’est mon truc. Et j’ai toujours adoré les grands classiques des comiques français. Mais c’est un humour souvent basé sur l’incarnation de personnages, je ne m’y voyais pas du tout. L’explosion du stand up ces dernières années – avec le Jamel Comedy Club notamment, le fait qu’il se soit imposé comme une discipline d’humour reconnue, ça a été le déclic : ça me permettait de raconter les choses à ma façon, en restant moi-même. Et de sortir un peu les mêmes conneries qu’on sort aux copains... mais en mieux ! (rires)



Ça ne doit pas être évident de tenter de s’imposer, à Bordeaux qui plus est...

Pour moi qui vient de Clermont et qui ne vit ici que depuis 5 ans, je trouve que c’est une bonne ville pour ça. Il y a déjà un bon public pour les comédies, mais peu de place pour les humoristes, et pas vraiment de lieu pour ça. De fait, on est assez peu nombreux ici alors on ne se marche pas dessus, c’est une chance (sourire). 
Une fois mon spectacle écrit, en novembre dernier, j’ai fait mes premières armes à l’Atelier 53, à Mérignac. Très bien pour débuter.

Et puis je suis monté à Paris, une semaine entière, où j’ai enchaîné une scène ouverte chaque soir, dans différents arrondissements. Impossible d’y amener des amis pour faire la claque, un public de connaisseurs, un niveau impressionnant même chez les amateurs... C’est là que j’ai pu vraiment peaufiner mon spectacle, adapter certains passages, tailler dans les longueurs. Tout est question de timing, d’intonation, d’enchaînement fluide. Mais, parfois, une vanne qui me fait rire ne marche pas, et il faut l’abandonner. Je me suis pris quelques tomates – côté positif, ça ne fait plus que 3 ou 4 fruits et légumes à manger par jour. Mais ça a été très formateur. 


Ensuite, j’ai souhaité jouer à Bordeaux. Mais comme les places dans les saisons des théâtres privés sont chères, et les auditions se font très tôt, j’ai saisi l’opportunité que me donnait le Chat gourmand – qui fait plutôt du concert –, un lieu parfait pour ça avec une chouette équipe. Ils sont contents, j’ai de bonnes critiques sur BilletReduc.com ! (rires) 



Est-ce facile de concilier ce rêve de percer dans le milieu et votre métier de chauffeur ?

Je vais vous dire : je crois que si j’avais fait un autre métier, je ne me serai pas lancé là-dedans. Vous n’imaginez pas toutes les situations cocasses, toutes les rencontres, toutes les choses qu’on peut trouver dans un tram, un bus. Le titre de mon spectacle vient de là. J’y parle de ma vie, donc je consacre un sketch entier à mon métier. L’autre jour, une dame monte fâchée dans le bus : “Le bus précédent n’est jamais passé ! Qu’est-ce qu’il a foutu votre collègue ?” Je lui ai fait : ”Madame, estimez-vous heureuse, au moins moi j’ai le permis !” (rires) Le genre de réplique qui me vient toute seule et que je peux facilement intégrer au spectacle... •

Recueilli par Sébastien Le Jeune 


Ce jeudi soir et les 1ers jeudis du mois au Chat gourmand (3, rue de Guienne), 20h buffet + spectacle 15€,
21h spectacle seul 5€. Tél. 05 56 48 24 48.

Photo : Ne vous fiez pas à cet air patibulaire : Sofiane Ettaï, en vrai, c’est une crème ! © DR