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"Pneuma": Carolyn Carlson dans le tourbillon de la vie PDF Imprimer Envoyer
Lundi, 17 Mars 2014 07:00

À l’invitation de Charles Jude, l’immense Carolyn Carlson est de retour ce lundi soir au Grand-Théâtre pour une série de sept représentations de « Pneuma », une création mondiale pour 22 danseurs du Ballet de l’Opéra national de Bordeaux sur une musique originale de Gavin Bryars. Rencontre.

 


« Pneuma », ou “souffle cosmique” en grec ancien. Après « Eaux » qu’elle était venue présenter ici en 2010, la chorégraphe californienne s’est à nouveau tournée vers les textes de Gaston Bachelard pour trouver l’inspiration, cette fois avec « L’Air et les Songes : essai sur l’imagination du mouvement ». « J’aime depuis toujours la façon qu’a Bachelard de mêler poésie et philosophie – moi-même je décris souvent mon travail comme de la poésie visuelle. Sa façon de parler de l’air en fait bien plus qu’une simple matière invisible qu’on respire. Ce n’est pas simplement de l’oxygène, et c’est pour ça qu’on aime tant les oiseaux, les nuages et les étoiles : il vous y fait penser comme à un matériau concret, un élément que l’on transperce pour aller chercher l’inspiration en regardant les constellations. » 


À quelques heures de la première, son phrasé se fait fécond, les gestes souples, le regard lointain et apaisé dès qu’il s’agit d’évoquer la spiritualité qui imprègne toute son œuvre, et ce « Pneuma » quasi mystique en particulier. Pourtant, elle le reconnaît, rien n’est encore parfait, elle est « tendue ». « J’ai beau avoir une grande carrière, c’est toujours comme ça. » Un sourire perce. Dans un incessant ballet entre la loge et les derniers calages du plateau, elle peaufine le moindre détail. « C’est difficile car tout est original : la musique de Gavin avec les musiciens de l’ONBA, les costumes et le décor travaillés par l’Opéra de Bordeaux, les lumières – heureusement, j’ai un magicien, Rémi Nicolas –, la danse... Il y a même un DJ, Philip Jeck, pour le prologue et six transitions entre les tableaux. » 



« Arriver l’esprit ouvert »

On parle technique. La gestuelle est précise, presque millimétrée, le débit plus rapide, quelques mots de français s’invitent parfois au milieu de l’anglais. « Ça se monte un peu à la manière d’un opéra, oui. J’ai 22 danseurs cette fois-ci, rendez-vous compte, c’est bien plus que les 12 que j’avais au CCN de Roubaix ou les 8 ou 9 que j’ai d’ordinaire à Paris. » Elle sort une poignée de croquis annotés – « j’en ai quatre carnets comme ça ». « Vous voyez, je “peins” d’abord la scène avec des images qui me viennent. Ensuite je dispose les danseurs dans l’espace et c’est seulement à la fin que viennent les pas, le mouvement. »


Les danseurs et danseuses du Ballet, elle les avait rencontrés pour une résidence en janvier. « C’était vraiment un temps très intéressant. Je leur avais donné le livre à lire, je voulais savoir comment ils le percevaient, ce qu’ils en retiraient. Il y avait donc plus que de la technique – même si j’avais aussi besoin de savoir ce dont ils étaient capables. Je leur ai appris mon langage chorégraphique. Certains ont pu me faire des propositions que j’ai modifiées pour les adapter à mon style. J’aime cette idée d’une œuvre construite tous ensemble. » 


Même écho pour la musique. Pour cette troisième collaboration, le “post-minimaliste” Gavin Bryars avait des consignes : « Je connais bien Gavin, je sais qu’il aime une certaine lenteur dans ses pièces. Là, je lui ai dit “je veux du rythme !” Et il ne m’a pas déçu. Même si certains mouvements étaient encore un peu lents, on a pu les ajuster – c’est l’avantage de travailler en direct avec l’orchestre. Mais j’ai aimé tout de suite : c’est à la fois très cosmique et mystérieux, profond et harmonieux. Il a su retranscrire ce que j’imaginais, quelque chose de proche de la sensation que j’ai eue dans le Grand Canyon, ce sentiment d’immensité qui vous submerge et vous fait vous sentir plus humain. » Et d’ajouter en français : « Inexplicable... » 


On l’appelle. Comme une tornade elle se lève. Le plateau n’attend pas. « Ah si ! Dites à vos lecteurs qu’il faut savoir une chose : comme la poésie, mon travail ne raconte pas d’histoire. Il faut vraiment arriver avec l’esprit ouvert et se laisser guider par sa propre imagination, ses propres interprétations ! » • 


Sébastien Le Jeune

Ce lundi soir et jusqu’à vendredi 20h, matinées mercredi et dimanche 15h, 8-45€. Tél. 05 56 00 85 95 ou www.opera-bordeaux.com

Photo : La mystique de l’air façon Carlson : « Comme la poésie, mon travail ne raconte pas d’histoire ». © Sigrid Colomyes

 

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