Qu’on ne s’y méprenne pas : si les Restons Calmes ! ont su tenir dix ans, ils n’ont pas pu se contenter d’improviser tout le temps. La preuve avec la 10e édition de leur festival Exigeons l’ImpRossible, une mécanique bien rodée entre matchs d’impro et nouvelles formes. Ça démarre ce mercredi à la Halle des Chartrons.

Pour que des amateurs puissent monter une manifestation de cette envergure sur quatre soirs, il faut quand même une organisation en béton : « Même si la troupe a grandi au fil du temps pour atteindre 35 membres aujourd’hui, elle a su garder sa patte grâce à un gros engagement demandé à tous, souligne Dominique Provenza, président de l’asso depuis un an et demi. Nous partageons encore aujourd’hui la même ambition que les membres fondateurs : donner des spectacles qui n’ont rien à envier à ceux des pros, rien qu’avec des amateurs hyper-motivés. » Agenda respecté, ateliers hebdomadaires en principe obligatoires, mise à contribution de chacun pour l’énorme logistique que nécessite le festival... De la rigueur quasi professionnelle.

L’autre clé de cette longévité est à chercher plutôt du côté de l’artistique : « Au fond, on est tous un peu des ronchons, reprend Dominique, entré dans l’asso il y a cinq ans. On se plaint toujours de ne pas en faire assez, ce qui nous rend très exigeants afin de progresser sans cesse et de ne pas céder au rire facile. Même pour le classique match d’impro, on veut être les plus rigoureux possibles car, comme disaient les fondateurs québécois du format, “plus le cadre est rigide, plus l’arbitre est sévère, et plus les comédiens donneront le meilleur d’eux-mêmes”. »

De gros matchs et des inédits
La citation, il la tire du livre de Pierre Martineau, premier maître de cérémonie de match d’impro au Québec, qui avait contribué à façonner le format à la fin des années 1970. Un grand bonhomme disparu trop tôt, en 2007, non sans avoir d’abord fondé la Licœur, première ligue girondine toujours établie à Cambes où il s’était installé en arrivant en France, et non sans être devenu le parrain de la première heure des Restons Calmes. Ce qui explique que, malgré une décennie où le monde de l’impro a été en constante évolution, l’asso s’est toujours tenue au décorum venu d’outre-Atlantique, sa scène patinoire et son arbitre à rayures entre autres.

Tout ça, on le retrouvera vendredi et samedi pour les matchs d’impro en équipe (six contre six), le “cœur de métier” des Restons Calmes, avec deux grosses écuries pour souffler les dix bougies. Les pros de l’Adiv de Poitiers vendredi pour une soirée aux airs de retrouvailles, puisque trois des historiques de l’asso en font désormais partie. Et une équipe complètement inédite samedi, un “All Stars” composé de joueurs parisiens, nantais, lillois, quasi tous pros ! « L’impro en France, c’est un petit monde, note Dominique Provenza. On est très fiers de cette sélection éphémère : tous sont d’un excellent niveau, ont déjà joué en face-à-face mais jamais ensemble. »

Mais, fidèles à eux-mêmes, les Restons Calmes ont réservé aussi de jolies surprises sur les autres soirs. Jeudi, le retour du format très exigeant – et très réussi la dernière fois il y a quatre ans – de la comédie musicale improvisée. Et demain, en ouverture, un format inédit, les Masters, du un-contre-un où, à la mode « Highlander », « à la fin il ne doit en rester qu’un ». Et en bonus, un autre inédit, gratuit celui-là, samedi après-midi : l’impro radio, la parole sans le geste, qui devrait être diffusée sur Campus Bordeaux.

Un dernier mot, d’ordre pratique : il reste toujours quelques places chaque soir à la billetterie sur place. Mais si vous voulez éviter 50 mètres de queue, un conseil : réservez ! •

Sébastien Le Jeune

À 20h30 chaque soir (ouverture guichet 19h45), mercredi-jeudi 5€, vendredi-samedi 8€ (4€ -12 ans), snack sur place. www.restonscalmes.com 

Photo : De l’impro amateure mais digne des pros, avec le vrai décor de patinoire à la québécoise © Sébastien Pucheu