C’est ce qu’on appelle tomber de Charybde en Scylla : arrachés à leur terre pour être vendus comme esclaves, 160 Malgaches allaient finir échoués sur une île déserte. C’était en 1761 et une passionnante expo archéologique nous fait découvrir cette histoire dès demain au musée d’Aquitaine.

Et même dès aujourd’hui à l’Athénée municipal (15h, entrée libre), où les deux commissaires scientifiques détailleront leurs 10 années de travaux au cours d’une conférence – à entendre aussi demain au musée (18h, entrée libre).

Car si des documents d’archives existaient, bien peu d’éléments concrets venaient les corroborer, et Max Guérout, parmi les fondateurs du Groupe de recherche en Archéologie navale, et Thomas Romon, chercheur à l’Inrap dédié à l’archéologie préventive, ont mené quatre campagnes de fouilles, sur terre et en mer, sur l’ilôt de Tromelin (à l’époque nommée l’île de Sable), au large de Madagascar dans l’Océan indien, là où le navire « L’Utile », parti de Bayonne, avait sombré avec sa cargaison illégale d’esclaves.

De nombreuses zones d’ombre subsistaient : comment ces “robinsons” – 80 rescapés du naufrage, dont seuls sept femmes et un bébé seront sauvés par le navigateur Tromelin – avaient-ils pu survivre 15 ans sur cet îlot dénudé ? Comment vivaient-ils ? Avec quelle nourriture, quels ustensiles ? Qu’ont-ils fait de leurs morts ?

L’exposition, montée avec le concours du musée d’Histoire de Nantes, retrace à la fois les fouilles et les découvertes des scientifiques, sur un plan archéologique mais aussi environnemental, autant d’éléments éclairants sur cette période où le commerce triangulaire battait son plein. Une visite qu’on complétera avec les salles du musée dédiée à la traite des esclaves, et avec plusieurs livres dont la très bonne BD de Sylvain Savoia, dont quelques planches sont présentées dans l’expo. • SLJ

Jusqu’au 30 avril (sauf lundis et fériés), 11h-18h, 3,50-6,50€. Ateliers enfants et animations détaillés sur www.musee-aquitaine-bordeaux.fr 

Photo : « Tromelin, l’île des esclaves oubliés » est le fruit de 10 ans de recherches archéologiques sur cet îlot hostile de l’Océan Indien. © Jean-François Rebeyrotte