Vendredi, Alain Juppé accueillait l’artiste catalan Jaume Plensa pour une visite de la ville au pas de course. Calendrier oblige, il doit s’en imprégner et s’en inspirer très vite, car le maire lui offre «une carte blanche» : concevoir une exposition d’œuvres monumentales en plein air qui doit être prête pour le 26 juin.


C’est en effet le jour qui a été retenu pour l’inauguration de cette exposition événement. Soit dans cinq mois à quelques jours près, un délai court dès lors qu’il s’agit de créer des pièces spécialement pour l’occasion. Le charme a opéré lors de cette visite, semble-t-il. Tant mieux, l’heure tourne déjà!



Goûter son plaisir

«Je suis très enthousiaste à cette perspective et je suis sur que les Bordelais le seront aussi.» pariait Alain Juppé en guise d’introduction à la présentation de l’événement. À l’origine de ce projet estimé à près de 200 000 euros dont la moitié sera financé par la Ville et l’autre moitié par du mécénat privé, la commissaire d’exposition Florence Guionneau-Joie, à qui l’on doit, en 2007, l’exposition des œuvres monumentales de l’artiste Bernard Venet dans douze des principaux sites de la ville. 


Pourquoi Jaume Plensa? «Je trouve que la démarche humaniste et le matériau, les lettres et les mots, entrent merveilleusement en résonnance avec la ville de Bordeaux et son histoire culturelle, répond-elle. L’œuvre de Plensa est construite en grande partie sur la poétique du langage, que ce soit dans la matière même ou dans le discours de l’artiste. Les notions de tolérance, d’échange, de communion génèrent des séries d’œuvres monumentales qu’il met en espace dans des lieux naturels ou urbains.»



Sera-t-il dans les temps?

«Dialoguer avec une ville à travers un projet comme celui là, c’est une opportunité et c’est aussi une responsabilité incroyable. La ville est occupée par ses habitants. Installer des œuvres dans l’espace public, c’est comme les installer chez les gens. Au cours de cette visite de Bordeaux que je ne connaissais pas, j’ai respiré, j’ai capté des choses, l’ambiance par exemple… Je dois dire que j’ai eu un choc lié à la beauté de l’architecture des bâtiments», racontait vendredi Jaume Plensa, dans un des salons du rez-de-chaussée de la mairie, aux côtés d’Alain Juppé et de Dominique Ducassou, adjoint à la culture. 


Il est trop tôt pour savoir dans quelles directions l’artiste va travailler. «Je n’ai pas d’idées. Pas encore», a-t-il dit. Et Florence Guionneau-Joie de préciser: «Nous étions dans un premier repérage. Les œuvres qui seront présentées à Bordeaux fin juin pourront s’inscrire dans le sillage de ses grandes statues, de ses œuvres anthropomorphiques ou encore de ses dernières créations, comme cette sculpture représentant une tête qui se trouve à Rio. Peut-être aussi que les pièces qui seront exposées naîtront de la rencontre avec Bordeaux et d’un nouveau geste artistique.» 



Convoi exceptionnel

Habitué à réaliser des œuvres de très grandes dimensions – quelques-unes sont installées de manière pérenne dans l’espace public, comme son «Nomade» de 8m de haut constitué d’un canevas ajouré de lettres blanches en inox figurant un personnage assis sur les remparts d’Antibes face à la Méditerranée –, le sculpteur va devoir se mettre au travail. Les pièces seront produites à Barcelone, là où réside l’artiste et où se trouve aussi son atelier, avant d’être acheminées jusqu’ici. 


À noter, l’exposition, qui devrait durer jusqu’à la fin septembre voire déborder sur le mois d’octobre, sera associée aux événements liés à la commémoration du tricentenaire de la naissance de Diderot. • 


Camille Carrau

Photo : Jaume Plensa est coutumier des installations de grande taille dans l’espace public. Ainsi «Olhar nos meus Sonhos, Awilda» et ses 12 mètres de haut dans les hauts de Rio de Janeiro. © Plensa Studio Barcelona