Tout juste passée professionnelle, la jeune compagnie En Aparté a investi 140 m2 de locaux derrière le Jardin public. Avec l’ambition d’y faire de ses «Traverses» un lieu de création mais aussi de partage, avec d’autres compagnies et les habitants du quartier.

2012 a véritablement marqué un tournant dans l’existence de la compagnie bordelaise. En avril, ses trois fondateurs, Nicolas Dubreuil, Marie-Lise Hébert et Diane Lefébure, franchissaient le cap du professionnalisme, puis, en septembre, ils se trouvaient un nid, rue Mandron, qu’ils allaient baptiser «Les Traverses» – évocation de leur volonté d’avoir «une logique transversale et de rencontres», explique Nicolas Dubreuil. 


Une installation à la faveur de quelques subsides publiques – le dispositif AJC Jeunes de la Ville de Bordeaux, des aides du Conseil général dans le cadre du développement d’un pôle théâtre à l’Esat de Verdelais à destination de personnes en situation de handicap cognitif... – mais surtout du soutien de l’université Bordeaux 4, avec laquelle le trio a gardé de solides attaches en présidant aux destinées du festival de théâtre étudiant Les Estudiantines, qu’il coordonnera pour une dernière fois cette année. Et, surtout, grâce à un petit «bas de laine» accumulé au cours de cinq ans de création.


Enfants des Chimères

La création, qui reste un axe fort de la compagnie dans son nouvel écrin. Au programme de la saison, y seront montés «Pause cigarette», un travail sur la condition de la femme signé Marie-Lise Hébert, «L’Exécuteur 14», un texte fort d’Adel Hakim sous forme de réquisitoire contre les guerres, et «La Mala Clase» («La classe à vau-l’eau»), réflexion sur la perte de repères chez les jeunes mise en scène par Nicolas Dubreuil sur un texte du Chilien Luis Barrales. Des pièces déjà appelées à être diffusées sur un plan régional.


Cette ligne privilégiant clairement un théâtre engagé leur vient de leurs années passées à mûrir leur art au sein du Théâtre des Chimères de Jean-Marie Broucaret à Biarritz, héraut d’une scène en prise avec son temps et son territoire. Et cette philosophie, on la retrouve aussi dans le désir de la compagnie de tisser des liens au niveau local. «Nous proposons à d’autres compagnies d’utiliser les salles de répétition pour un prix symbolique, précise Nicolas Dubreuil, et mettons aussi à leur disposition des ressources mutualisées – bibliothèque, costumier, aide administrative. Autant de moyens de rencontres et d’échanges, qui ont déjà porté des fruits en termes de création commune.»


Les Traverses se conçoivent aussi comme un lieu de vie ouvert à la vie du quartier – des résidents viennent ainsi en voisins assister aux répétitions ou alimenter la bibliothèque partagée. «Des à-côtés qui nous font aller au contact de publics différents et qui, là encore, nourrissent et enrichissent la création.» Un ancrage de quartier qui étoilera bientôt sur toute la CUB avec leur projet de «Théâtre invisible», des saynètes improvisées dans l’espace public, dont l’idée sera de mettre en scène et d’alerter sur les discriminations.• SLJ 


Répétitions publiques de «L’Exécuteur 14» le 28 février à 10h et 14h30. Stage théâtre enfants du 11 au 15 mars.
Tél. 05 35 38 73 93 et www.en-aparte.org

Photo : La Cie En Aparté défend un théâtre engagé: «Pause cigarette» traîtera de la condition féminine. © Guy Labadens