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Le tweet, nouvel horizon litteraire? L'interview, la vraie PDF Imprimer Envoyer
Mercredi, 13 Mars 2013 07:00

Quand Jean-Michel Le Blanc ne s’occupe pas du service des correspondants au journal «Sud Ouest», il s’adonne à la twittérature: l’exploitation littéraire des gazouillis du réseaux social Twitter. Directeur de l’Institut de twittérature comparée Bordeaux-Québec, il nous explique la twittérature, de la naissance de sa passion à la création du deuxième Festival international de twittérature, organisé à Bordeaux, le 30 mars prochain, dans le cadre de la Semaine digitale.


Comment a commencé votre histoire avec Twitter, et donc avec la twittérature? 

Je m’y suis mis le 21 juin 2009 précisément, parce que mes collègues de travail avaient un compte Twitter et en parlaient souvent. Ce que j’ai tout de suite trouvé rigolo, c’est qu’on ne puisse écrire qu’en 140 caractères. J’ai réfléchi, et me suis fait le pari de ne faire que des tweets de 140 caractères, pas un de plus, pas un de moins. J’en ai désormais 3000 et ils font tous exactement 140 caractères. Même quand je réponds publiquement ou en privé à quelqu’un. En fait, je me suis servi de la contrainte pour pouvoir m’exprimer et m’amuser. 




C’est une des bases de la littérature, beaucoup de courants se sont définis par leurs contraintes…

Oui, ne serait-ce que la poésie rimée, les haïkus, mais aussi tout ce qu’a développé l’Oulipo (groupe d’écrivains des années 1960 qui stimulait son écriture en s’imposant des contraintes formelles, ndlr). On te fixe une règle et tu t’amuses à délirer dessus. Comme Georges Perec avec «La disparition», le livre qui ne contient pas la lettre «e». C’est dans la même veine. C’est pour cela que l’on peut parler de twittérature: parce que c’est une forme de littérature, mais appliquée à Twitter. Au même titre, il existe plusieurs twittératures, car la contrainte que j’applique est une forme, mais d’autres tweetent des romans, morceaux par morceaux, font des histoires, etc. On peut écrire sous plusieurs formes en se servant de Twitter comme base, et la twittérature regroupe toutes ces formes-là.




Comment est né le Festival international de twittérature? 

C’est le Canadien Jean-Yves Fréchette (twitterateur qui tient le compte @pierrepaulpleau, ndlr) qui m’a contacté. Ancien professeur, il s’est greffé à la délégation québécoise du jumelage Bordeaux-Québec, venue en juin 2010 pour la fête du vin. Il était missionné pour jauger des possibilités de la twittérature dans la pédagogie, c’est à dire de se servir de twitter comme base d’enseignement, via des twittclasses par exemple. Je l’ai hébergé pendant une semaine et on a planché dessus, pour finir par créer l’Institut de twittérature comparée (ITC). Aujourd’hui je préside l’ITC Bordeaux-Québec (asso loi 1901), et lui celle de Québec-Bordeaux. Le but est d’intéresser les gens à la twittérature à travers des manifestations. Jean-Yves a réussi à mettre en place le premier festival de twittérature à Québec en octobre dernier. Il s’appelait «140 max», et s’inscrivait dans le cadre du festival de littérature québécois «Québec en toutes lettres». Il s’est étalé sur toute une journée, et ça a bien marché.




Celui de Bordeaux est donc la deuxième édition? 

Oui, on prévoyait de refaire le festival à Bordeaux en octobre 2013, en s’appuyant sur le jumelage de nos deux villes. La surprise fut que la ville de Bordeaux nous a contacté la première, par l’intermédiaire de Claude Malaison (@Emergent007), un canadien très branché numérique. C’est lui qui a eu l’idée d’inscrire le Festival de twittérature dans le cadre de la Semaine digitale, et nous nous y sommes mis dès le mois de janvier. 




Finalement, il y a beaucoup plus de twittérateurs qu’on ne le croit? 

Des centaines de personnes se servent de Twitter comme outil d’écriture. C’est comme Monsieur Jourdain qui fait de la prose sans le savoir: beaucoup font de la twittérature sans le savoir. C’est sûr «twittérateur» ça fait un peu pompeux comme titre, mais c’est aussi un jeu.



Vous organisez d’ailleurs deux jeux-concours…

Il y a deux concours. Un ouvert aux écoles, relayé par l’inspection de l’académie. Les écoles, collèges et lycées d’Aquitaine peuvent tous participer. Il s’agit de faire un tweet par classe, sur un même thème. On a choisi celui du «pont», en l’honneur du pont Chaban-Delmas qui va être inauguré, bien sûr, mais aussi en référence au pont qui unit les villes de Bordeaux et Québec.
 L’autre concours est ouvert au grand public et aura lieu le 20 mars, pour la journée internationale de la francophonie. Tout ceux qui ont un compte Twitter peuvent participer. Nous évaluerons plusieurs critères, dont celui d’écrire exactement 140 caractères, l’orthographe, le thème du pont, les figures de style, l’originalité etc. Le règlement du concours est composé de 100 clauses de 140 caractères.




Comment procédez-vous pour rédiger vos tweets? 

J’ai toujours un carnet sur moi. J’écris sur tout. Je vois un panneau, je vois une maison, ça peut être n’importe quoi. Ensuite c’est comme un jeu avec moi-même. Je m’écris le début d’une phrase et il faut que je trouve la fin. Ce que j’aime bien, c’est les fins un peu absurdes ou les contre-pieds, voire un jeu de mot un peu bête, ou une blague à deux balles. Des réflexions, une plaisanterie, il y a de tout. À la fin, je vais sur Twitter, et je la calibre en changeant des mots, des adjectifs, etc.




À quel point pensez-vous que la twittérature puisse se développer? 

Ce n’est pas important qu’elle se répande. L’important c’est qu’il y ait des gens qui prennent du plaisir à faire des choses, et d’autres à les lire. Et puis, la twittérature, ce ne sera jamais du Barbara Cartland. Faire de l’eau de rose en 140 signes, ce n’est pas facile.






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Recueilli par Antony Milanesi 


Pour aller plus loin :

Le livre de Jean-Michel Le Blanc: «Le compte des mille et un tweets».
Le livre de Jean-Yves Fréchette: «Tweet Rebelle».




Le blog de Thierry Crouzet: une histoire de la twittérature à travers les âges.


Photo : Jean-Michel Le Blanc © DR

 

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