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I Muvrini: un chœur gros comme ça PDF Imprimer Envoyer
Mardi, 26 Mars 2013 08:00

Vendredi, le duo corse I Muvrini sera de retour à Bordeaux pour la tournée de son dernier album, le généreux «Imaginà». Entretien avec Jean-François, l’aîné des Bernardini.


Cela fait plus de vingt ans que vous portez la culture corse à travers le monde. Qu’est-ce qui explique ce succès au long cours?

Eh oui, dès les premières tournées, nous avons rencontré un succès inattendu. «Les Corses ne peuvent chanter que pour les Corses», c’est bien connu ! Je crois que nous avons réussi à convaincre les gens que les petits peuples ont leur place dans le concert du monde. Beethoven disait, «Si tu veux être international, chante ton pays». Et c’est précisément en allant à l’“étranger”, en France métropolitaine, mais aussi, par exemple, en Allemagne et en Suisse d’où nous revenons, qu’on a réussi à sortir la musique corse du créneau régional où l’on veut nous caser. Que l’on joue de la cornemuse ou que l’on soit un chanteur qui porte la main à l’oreille, le problème est le même : on veut nous assigner au “patrimoine”. Le public, lui, voit bien au-delà de ça, et comprend qu’on ne peut plus être séparés sur la planète aujourd’hui.



La réflexion vaut-elle pour le public corse lui-même? On vous a parfois accusé de “trahir” la tradition corse...

Au fil du temps, on a beaucoup entrainé les gens à mésestimer leur langue, leur culture. Mais a contrario, à trop vouloir la défendre, on crée un label, immuable, et on a tôt fait de taxer les gens de “corruption” ou de “trahison”. Ça nous est arrivé dès qu’on a introduit du piano ou quand on a chanté avec Sting... Or nous ne sommes pas des conservateurs mais des créateurs. Nous pouvons donner aussi bien dans la polyphonie traditionnelle que dans la pop ou chanter l’Afrique. Créer, c’est se réinventer en permanence, être de son époque. Et la plupart des gens sont heureux de nous voir prendre ces risques, éveiller leur curiosité.


Après, on ne fait pas l’unanimité, et heureusement ! Nous n’avons pas la prétention de représenter toute la culture corse. Mais partout où nous allons, nous emmenons un peu de Corse avec nous. 
Et cette reconnaissance, je crois qu’elle aide les Corses eux-mêmes à dépasser leur aliénation, leur mésestime qui les vouerait à la folklorisation. En étant à l’écoute du monde, en étant curieux de l’autre, nous leur disons qu’on peut sortir de la carte postale à laquelle on était destiné. C’est ce pari-là que nous gagnons aujourd’hui.



«Imaginà» pousse encore plus loin votre message humaniste...

Oui, il y a un appel à se renouveler, à s’ouvrir, à accepter le changement – en prenant appui sur ce que l’on est vraiment. Nous aimerions réconcilier chacun avec ses propres terres intérieures. Parce que c’est quand je suis bien enraciné que je peux ouvrir les bras. Quand nous chantons des hommages à l’Afrique ou à l’Amazonie, c’est la conscience planétaire que nous chantons. 


Nos concerts, on le voit tous les soirs, ce ne sont pas juste des salles pleines qui reprennent en chœur des chants en langue corse. Non, notre public a une qualité d’écoute qui va bien au-delà, et notre rôle est non seulement de le divertir, mais aussi de lui donner cette nourriture-là, qui relie les consciences et unit toutes les générations. Être transformant, c’est ça le rôle d’un artiste.



Vous êtes connus pour vos concerts marathon, qui dépassent souvent allègrement les 2 heures!

C’est vrai – presque 3 heures il y a peu à Poitiers! C’est toujours pareil: au début, on s’apprivoise, et à la fin, quand le public décide de ne pas quitter la salle, que voulez-vous qu’on fasse? On revient, forcément, on n’arrive pas facilement à lui imposer de partir. C’est le public qui fait durer le plaisir, et c’est merveilleux. Je crois qu’il est sensible à la fois au message, à l’ambiance, et au fait que le spectacle est soigné techniquement. Avec cinq musiciens et trois chanteurs, on alterne les parties traditionnelles, des parties pop ou electro, des passages plus sobres avec du piano solo, avec en fond des vidéos et des images. Nous avons à cœur d’être exigeant parce qu’un beau spectacle, c’est ce qu’il y a de mieux pour favoriser la rencontre. •

Recueilli par Sébastien Le Jeune

Vendredi, à 20h30, au Théâtre Femina, 41-45€. Tél. 05 56 48 26 26 ou www.box.fr

Photo : Jean-François et Alain Bernardini, ambassadeurs de l’âme corse depuis plus de vingt ans. © Columbia

 

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