Envie d’un week-end différent, sexy, anticonformiste et à contre-courant? Ça tombe bien, le festival Cinémarges démarre demain. Avec une 14e édition rallongée et, grande nouveauté, ce week-end inaugural dans les murs de la Manufacture Atlantique.

En 14 ans, ce festival qui a su s’imposer au fil des années comme un rendez-vous incontournable autour des questions de sexe, de genres et d’identités. Cette année, Cinémarges se consacre à un sujet drôle, créatif et politique: le travestissement.



Des héros pauvres, transgenres gays ou noirs!

«Cette thématique nous a été inspirée par le retour en France du Voguing, marqué par la sortie en 2012 de deux ouvrages, “Voguing” de la photographe Chantal Regnault et “Strike a pose” coécrit par Jérémy Patinier et Tiphaine Bressin, et le succès récent des soirées parisiennes “House of Moda”.» Le Voguing est une danse urbaine née à Harlem dans les années 1970 au sein des communautés blacks et latinos qui affiche la fierté homosexuelle de façon électrique par le biais de concours de costumes exubérants et de battles de danses [à grands renforts de poses inspirées par celles des mannequins dans les magazines de mode comme «Vogue», d’où le mouvement tire son nom, ndlr].


«Plus largement, reprend-elle, nous avons tissé un lien tout au long de la programmation autour de la figure du travesti inscrite dans les questions de genres, bien au-delà de celles liées à l’homosexualité et aux sexualités», précise Esther Cuenot, à la tête de la manifestation depuis sa création en 1999. Fait marquant, le week-end d’ouverture à la Manufacture Atlantique, démarre non pas par le récit d’une expérience filmée, mais par un atelier drag queen (sur réservation, lire plus bas).



Culture club

Plusieurs rendez-vous sont à l’affiche du théâtre ce même jour dont la projection à 19h et à minuit de «Paris is Burning», documentaire référence sur le phénomène Voguing. À ne pas rater en suivant à 21h, «La Toto», spectacle solo dans lequel le chorégraphe et danseur uruguayen Roberto Vidal met en scène problématiques identitaires et parcours intime. «C’est un hommage à mes amis travelos d’Amérique du Sud», explique-t-il, avant d’ajouter: «Je l’ai imaginé comme si le spectateur regardait par le trou de la serrure de la chambre d’un mec qui aime jouer à la poupée avec son corps. La question posée ici étant: comment se laisser regarder?» 
Et samedi soir oblige, de 22h à 2h, la Manufacture Atlantique se transformera en dance-floor house et catwalk pour défilés de drag kings et drag queens… 



Folles à l’écran, femmes à la caméra

L’édition 2013 est riche avec près d’une vingtaine de films sélectionnés et une douzaine d’invités dont le critique de cinéma Didier Roth-Bettoni, auteur d’une somme sur «L’homosexualité au cinéma», qui donnera une conférence sur «La figure du travesti à Hollywood» le 2 avril à 19h30 au cinéma Jean-Eustache à Pessac, et présentera le documentaire «The Celluloid Closet» le mercredi 3 avril à 17h à la Bibliothèque Mériadeck. 


Pour ceux qui aiment l’exubérance et l’esthétique “camp” [efféminé ostentatoire, ou folle, ndlr], la soirée «Folles du désert» à l’Utopia le 5 avril est toute indiquée avec la projection des films «Priscilla folle du désert» et l’excentrique western «Lust In The Dust» dans lequel excelle Divine, travesti, actrice fétiche du cinéaste indépendant américain John Waters.


En parallèle de cette programmation haute en couleur, Cinémarges nourrit une seconde thématique «Femme à la caméra» et offre à cette occasion une carte blanche au Festival international de Films de femmes de Créteil qui montre trois films dont «Roméo», une histoire d’amour entre un garçon encore au placard, plutôt joli, débordant de vie, et un jeune trans en plein milieu de sa transition «female to male»... Consultez le programme. 2013 est un grand cru. • 


Camille Carrau

Ce week-end, à la Manufacture (226, boulevard Albert-Ier – lire ci-dessous). Également demain samedi, à 15h à la librairie Mollat: table ronde «Les scènes du travestissement», avec Chantal Aubry, Tiphaine Bressin et Louise De Ville (performeuse burlesque).

Ce week-end à la manuf’
Samedi
Atelier drag-queen
Par Roberto Vidal, 13h-16h, 12€, sur inscription uniquement au 05 56 85 82 81.
«Paris is Burning»
Documentaire (1990), 19h et minuit, 5€
«La Toto», Roberto Vidal
Danse, 21h, 8-15€
«Strike a Pose !»
Dance-floor, avec DJ Truella d’Enfer et DJ Barbeat-Boy, 22h-2h, gratuit.

Dimanche
«La Moussaka de Desdemona»
Banquet littéraire par le Collectif Crypsum, d’après le roman «Middlesex» de Jeffrey Eugenides (repas Quiconcept), 15-20€

Du 2 au 7 avril
Projections à l’Utopia, au cinéma Jean-Eustache (Pessac) et à la Bibliothèque Mériadeck. Conférences au Jean-Eustache et à l’Université Victor-Ségalen (Victoire).

Programme détaillé sur www.cinemarges.net

Photo : Le travestissement est au coeur de cette 14e édition. Roberto Vidal y fait référence dans «La Toto» (à dr.). © DR