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Axel Bauer, phoenix à sang froid PDF Imprimer Envoyer
Lundi, 08 Avril 2013 07:00

Joli coup pour l’I.Boat : à l’occasion des 30 ans de la chanson culte, le “Cargo de nuit” bordelais reçoit ce mercredi Axel Bauer en showcase gratuit ! Joli coup aussi pour le chanteur, de retour après sept ans d’absence avec un nouvel album, le très réussi «Peaux de serpents». Entretien.


Une nouvelle fois, de longues années ont passé depuis votre dernier album. On est tenté de dire “mais qu’avez-vous fait tout ce temps?”

Je comprends cette réputation, pas fausse, de chanteur à éclipses. Mais il ne faut pas croire que je suis resté sans rien faire. Après la sortie de «Bad Cowboy» en 2006, j’ai tourné environ deux ans, et ensuite il y a eu des rebondissements, des problèmes de label: on m’a rendu mon contrat chez Universal alors que je me remettais au travail, puis mon nouveau label Chrysalis a été racheté par BMG, ce qui a encore freiné l’élaboration de l’album. Tout ça m’a finalement décidé à partir seul sur ce projet. L’autre raison, c’est que j’ai voulu prendre mon temps pour que l’album soit bien, ou au moins que j’en sois satisfait.



Avec un tel titre, on s’attend à une mue radicale, or ça sonne familier…

En fait, le titre vient de ma fascination pour le serpent. J’ai toujours aimé dessiner, et longtemps j’ai dessiné des serpents ou les motifs de leurs peaux, je les trouve jolis à l’œil. Et puis c’est un animal à la symbolique forte, la tentation, le danger, bien sûr, mais aussi le Verbe et la conscience chez les Mexicains, par exemple.

Là où, oui, il y a transformation, bifurcation pour moi, c’est que je crois que l’album est plus rock et, surtout, plus littéraire que pop. Il est très différent de ce que j’ai pu faire avant, parce que j’ai vraiment voulu assumer ce côté chanteur en français. C’est bizarre de dire ça puisque j’ai toujours chanté en français mais, avant, je me bornais à chercher les mots qui allaient avec la musique. Là, c’était l’inverse.



Pour les textes, en plus des vôtres, vous avez fait appel à Gérard Manset, Brigitte Fontaine et surtout Marcel Kanche. Comment l’avez-vous rencontré? Qu’a-t-il apporté à l’album?

Marcel, je le connaissais de nom, pour ses textes pour M dans «Qui de nous deux» ou Vanessa Paradis dans «Divinidylle». Comme j’écris déjà des textes, je n’étais pas spécialement en recherche, mais mon tourneur a fait les présentations. Et là, en une poignée de mains, en un regard, j’ai senti les prémisses de quelque chose. Comme si c’était une rencontre d’artiste à artiste, pas une rencontre auteur-musicien. Plus tard, il m’a envoyé des textes et les mots qu’il écrivait, j’aurais moi-même pu – non, voulu – les écrire. Il a un sens de la concision incroyable, il est capable de faire passer de puissantes images en une ou deux phrases. Ses textes m’ont parlé au fond de moi, ont résonné comme des choses précieuses. 


C’est sa venue sur l’album qui a donné le ton des textes, qui m’a obligé à les sublimer avec la musique, et je crois que ça lui a plu. Parce que j’ai dû faire en sorte que ma voix passe au-dessus du mur des guitares, laisser de l’espace pour qu’elle soit plus en valeur. Ce qui fait que c’est plus un album de chanteur que de guitariste, plus un album d’auteur que de musicien.



Par moments, du coup, votre phrasé évoque Bashung…

C’est vrai. Lui aussi a subi cette transformation, passant de la pop de «Gabi» et des «Vertiges» à quelque chose de plus tendu, plus sombre, plus approfondi. Et derrière, il y avait Manset, qui a aussi influencé des Christophe, des Cabrel… Pourquoi? Parce qu’ils ont osé comme peu d’autres cette originalité, osé faire illuminé pour pouvoir explorer de nouveaux territoires dans leurs textes, en acceptant le français et sa poésie, dans la lignée d’un Ferré, d’un Brel. Personnellement, je m’y retrouve, dans cette filiation. 



Finalement, on l’a vu, vous n’êtes pas si seul, quoi qu’en dise le titre de votre autobiographie parue l’an dernier, «Maintenant tu es seul»…

Oui, cette phrase faisait allusion à un moment particulier de ma jeunesse, entre un père et son fils. Il y a du chemin parcouru ! Le côté solitaire, on le retrouve dans le label, mon label, Acceleration, que j’ai créé pour être mon propre producteur. Mais dans l’album, il y a Kanche, Fontaine, Manset, Jean-Louis Aubert aussi, un ami de 30 ans, pour un duo. Et de jeunes mecs aussi, un vielliste classique, le batteur de Phoenix, le mixeur de Cassius… On va dire que sur le coup, j’étais seul mais bien accompagné.



Chose étonnante, il n’y a pas une seule vraie chanson d’amour sur l’album…

En effet, je n’ai pas eu envie d’intégrer de textes où on sentirait plus le couple. Peut-être que certains verront dans le single «Souviens-toi» une chanson d’amour, comme un chemin pour reconquérir quelqu’un. D’autres y liront la voie de la reconquête de soi… Un thème assez spirituel de vieux bluesman, celui du voyageur qui cherche sa maison. Où la vie est comme une route qui défile, où l’on se perd, on se retrouve, où l’on trouve des clés pour se comprendre soi-même… L’autre thème très présent, c’est l’amitié – qu’on sent notamment dans la chanson avec Jean-Louis. Finalement, c’est un album d’homme... Ou plutôt un album d’homme à homme.



En préparant l’interview, je suis tombé sur la setlist de votre concert parisien au Café de la Danse, fin mars. Vous avez repris «Cherchez le garçon» de Taxi Girl – un hommage à Daniel Darc?

Oui, j’ai été très bouleversé par sa mort. Il n’avait qu’un an de plus que moi, et nos routes se sont maintes fois croisées. Avec le temps, on s’habitue, en le connaissant, à vivre avec la perspective de sa mort… Et on s’habitue aussi à ce qu’il ne meure jamais. C’était quelqu’un chez qui on pouvait aisément reconnaître les deux parts qui cohabitent en chacun de nous. D’un côté une lucidité extrême, de l’autre une tentation d’explorer les abîmes qui en a fait ce phoenix qui renaissait parfois. Il n’a pas eu de son vivant la reconnaissance populaire qu’il méritait, qui lui aurait peut-être permis de mieux sortir de l’abîme. Je regrette un peu de ne pas avoir eu l’occasion de faire quelque chose avec lui. Alors j’étais à son enterrement, et par cette chanson j’ai voulu lui rendre hommage et faire encore durer le deuil.


C’est fou comme la mort semble la meilleure promotion qu’on puisse avoir. Là, ça donne l’impression qu’on s’intéresse de nouveau à lui… Et ça a été le cas pour moi aussi, quand en octobre dernier on a annoncé ma mort sur Internet! C’est vraiment un métier très difficile et on en est pas toujours conscient: on est exposé tout le temps, alors il faut avoir la peau dure… Des peaux de serpents!



En ce moment, vous tournez en trio, pas en “full band”. Pour quelle raison?

Avec le groupe, on ne va faire quasiment que des festivals, souvent excentrés des grandes villes. Alors on s’est dit qu’une tournée resserrée serait un bon moyen de toucher tout le monde. Et puis ce côté plus intimiste permet d’explorer de nouvelles façons de faire. C’est assez amusant de revisiter ainsi les titres, qu’ils soient récents ou anciens comme «Cargo» ou «Éteins la lumière». On n’a pas l’impression de se répéter, et je crois que le public apprécie lui aussi.



Un souvenir d’un concert à Bordeaux en particulier?

Oui ! C’était il y a 25 ans, Bordeaux était la 2e date de ma première tournée, je crois bien. J’étais tellement perdu en tournée, tellement ému et flippé que j’ai lancé «Bonsoir Clermont!» (rires) Certains ont cru à la provocation mais, vraiment, ce n’était pas voulu…
 
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Recueilli par Sébastien Le Jeune

Mercredi, à 20h, à l'I.Boat, entrée libre. www.iboat.eu
Également en dédicace au Cultura de Bègles, mercredi à 15h.

Photo : Lassé des problèmes de label, Axel Bauer a sorti son 6e album sur son propre label, Acceleration. © Yann Orhan

 

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