Le revoilà enfin dans les rayons, le déjà culte «Le bleu est une couleur chaude». Le premier roman graphique de Julie Maroh est un véritable coup de maître, primé à Angoulême et dont l’adaptation libre par Abdelattif Kechiche sous le nom de «La Vie d’Adèle» vient de décrocher la Palme d’or à Cannes.


Il y a peu, Maxime, le passionné responsable du rayon BD de la Fnac Sainte-Catherine, n’en revenait pas : la Palme était là, et pas un exemplaire à proposer aux lecteurs ? «Glénat a un peu manqué de nez», pestait-il. Un couac vite réparé, donc, et ceux qui ne connaissaient pas ce petit bijou peuvent enfin se jeter dessus.

Pour faire court, «Le bleu...» suit Clémentine de la seconde à un peu après la terminale dans son éveil à l’autre, à la différence, à son propre corps dans cette étape cruciale de la vie d’une femme. Cruelle adolescence, encore plus quand on s’entiche, comme elle, d’une autre fille – la troublante Emma aux cheveux bleus. À corps défendant au début, sans comprendre son désir, entre reculades et fuite éperdue dans un amour qui va la dévorer. Le tout est construit en flashbacks dans les yeux d’Emma, d’après le journal intime de Clém’, dont on sait d’entrée qu’elle «n’est plus de ce monde». Pour quelle raison ? On n’en dira pas plus...



Pas une bluette bleue

Romance puérile ? Nenni ! Julie Maroh a réussi mettre une subtilité rare dans la trame des histoires d’amour mille fois usées, sans jamais esquiver les questions qui fâchent, le regard des autres à l’école, les relations familiales tendues, le militantisme lesbien – son Emma est une activiste de la cause queer. Au contraire, elle ose le cru, le sexe qui happe, qui dérape et engloutit (sans jamais virer au mauvais porno d’hétéro), elle ose les dialogues et les scènes qui font mal. On est très loin d’une bluette bleue. 


On serait tenté de dire que c’est un “hymne sensible à la tolérance”, bla bla tout de suite les grands mots. Mieux vaut laisser parler l’auteure qui, sur son blog* (où on lira aussi son regard ambivalent sur le film), rappelle les fondamentaux d’une «ridicule histoire» écrite l’été de ses 19 ans : «Moi ce qui m’intéresse c’est la banalisation de l’homosexualité. Je n’ai pas fait un livre pour prêcher des convaincu-e-s, je n’ai pas fait un livre uniquement pour les lesbiennes. Mon vœu était dès le départ d’attirer l’attention de celles et ceux qui ne se doutaient pas, se faisaient de fausses idées sans connaître, me/nous détestaient (...) En raison de nos différences.» 
Pari gagné, haut la main.. • 


Sébastien Le Jeune

Julie Maroh, «Le bleu est une couleur chaude» (Glénat), 156 p., en vente à la Fnac, 15,50€

Avec la Fnac et Bordeaux7.com, gagnez un exemplaire de cet album en étant parmi les 5 premiers à répondre à cette question:

«Quelle actrice incarne Emma à l'écran dans le film de Kechiche?»

Envoyez votre réponse à info@bordeaux7.com

Les cinq gagnants pourront retirer le livre directement à la Fnac Sainte-Catherine.

Photo : La scène du premier regard entre Clém’ et Emma, sa belle bleue. Une jolie histoire au dessin vivant, au découpage enlevé et au choix parcimonieux, intelligent de la couleur. © Julie Maroh - Glénat