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Sabine Weiss, les yeux dans les yeux PDF Imprimer Envoyer
Lundi, 09 Septembre 2013 08:00

À 89 ans, Sabine Weiss a parcouru la planète pour faire des images. La Base sous-marine lui rend hommage avec «Instants fugaces», expo de 130 clichés noir et blanc de l’après-guerre à aujourd’hui. On y découvre le regard sensible et authentique que cette photographe résolument optimiste a posé sur le genre humain.

À 21 ans, lorsque la guerre se termine, vous quittez la Suisse pour vous installer à Paris en tant qu’assistante photographe de mode. Quel genre de jeune femme étiez-vous ? 

Je me suis installée à Paris à cause d’un amour insoluble. Il faut parfois tirer un trait dans la vie. Partir était pour moi une solution. J’avais déjà quatre ans de métier à cette âge et je vivais avec peu d’argent. J’étais beaucoup plus jeune que maintenant, mais à peu de choses près la même. 



C’était comment, photographier à cette époque ? 

C’était un métier d’artisanat, très technique et si différent d’aujourd’hui que personne peut se l’imaginer. On travaillait pas avec des petits appareils. On portait des choses très lourdes. Mon mari me réveillait la nuit pour me tirer de mes cauchemars. Je rêvais souvent de la photo ratée. J’avais peur quand je me rendais au laboratoire pour voir le résultat des prises de vues. 



Et être une femme photographe à la fin des années 1940 ?

Il y avait peu de femmes photographes à cette époque. C’était un milieu macho. Je me souviens que, sur certains événements où 15 à 20 photographes étaient présents, mes confrères me disaient de leur laisser la place ne me considérant pas, étant une femme, comme leur collègue. Sans doute imaginaient-ils que je me trouvais-là pour profiter de l’arrivée d’une personnalité… 



Vous avez été, entre autres, reporter pour l’agence de photojournalisme Rapho. 
Et c’est à Doisneau, au début des années 1950, que vous le devez…

Oui. Une de mes photos venait de paraître dans «Vogue». Un portrait de Miró. Le directeur du magazine m’a demandé de venir au journal afin de lui montrer mon travail. Et j’y suis allé avec sous le bras des choses très différentes. Dans le bureau, au moment de cette entrevue, il y avait un petit homme qui regardait ce que je montrais. C’était Robert Doisneau que je ne connaissais pas. Il a dit : «Elle a tout compris.» Très vite après, il a parlé de mes images au fondateur de l’agence Rapho qui m’a engagé. 



Comment le contexte de l’après-guerre a-t-il influencé votre travail selon vous ?

Il ne m’a pas influencé. Je crois que j’aurais fait la même chose à une autre époque. 



Que votre travail soit rattaché à la mouvance de la photographie humaniste, cela vous convient-il ? Et comment la définiriez-vous ?

C’est une manière pour le photographe de montrer ce qui le touche dans l’humain. On peut dire, très certainement, que mon travail personnel est humaniste. Mais j’ai fait aussi des tas de choses très différentes.



Vous avez tenu au fil de vos voyages ce que vous nommez votre journal intime. Un recueil d’images. Pour l‘exposition, quel choix avez-vous fait dans ce journal que l’on suppose si vaste ?

Le choix a été fait par Danièle Martinez, directrice de la Base sous-marine. Elle a même complété la sélection qui avoisine les 130 photographies par des images qu’elle a vues dans des publications. Au final, j’aime beaucoup son choix, mais pour moi le résultat allait être une surprise totale. D’habitude, je sais à quoi l’exposition va ressembler. Pas là. • 


Recueilli par Camille Carrau

«Instants fugaces», jusqu’au 13 octobre à la Base sous-marine (boulevard Alfred-Daney). Entrée libre.


Photo : «Petites filles, Sud de la France, 1953»
© Sabine Weiss

 

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