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Echo à venir: Ikonika, casseuse de codes PDF Imprimer Envoyer
Mercredi, 18 Septembre 2013 07:00

Pour sa 2e édition toujours aussi ambitieuse, le festival Écho à venir s’est choisi une tête d’affiche qui lui ressemble : «l’iconoclaste» Ikonika, alias Sara Abdel-Hamid, l’une des productrices londoniennes les plus en vue actuellement. Auteur d’un «Aerotropolis» remarqué, elle se plaît à bousculer l’ordre établi dans l’univers electro. Entretien.


On l’avait laissée sur une poignée de singles brillants et «Contact, Love, Want, Have», un album majeur salué autant par la critique que le public : le son Ikonika était là, sorte de dubstep du futur, beats syncopés en diable, basse surtravaillée, et de la mélodie aussi bien troussée qu’accrocheuse tissée à grands renforts de sons 8-bits. Et, surprise, revoilà l’égérie de Kode9 et de son label archi-novateur Hyperdub (Darkstar, Laurel Halo, Flying Lotus, Burial, Zomby, Martyn, DJ Rashad…), offrant avec «Aerotropolis» un tout nouveau visage. Le son a évolué, combinant un dubstep toujours plus avant-gardiste, synth-pop luxuriante et des rythmiques moins hachées, plus dansantes, presque house. Stupéfiante transformation d’un personnage qui reste unique en son genre.



La presse n’avait pas tari d’éloges à la sortie de votre premier album, parlant de vous comme élaborant le «futur du dubstep». Là, vous semblez prendre le contrepied. Étiez-vous déjà fatiguée du son dubstep ?

En quelque sorte, oui. Vous savez, je suis complètement autodidacte, j’ai appris à composer de la musique en achetant des magazines spécialisés, en téléchargeant des tutoriels sur le Net, en empruntant des machines à des amis. Je suis reconnaissante pour ça au dubstep et au UK garage, à leur communauté, à ce son identifiable : c’était bien pour un début dans les musiques électroniques. 


Mais, au fil de mes rencontres, de mes DJ sets, je me suis frottée à d’autres genres, j’ai gagné en connaissances, et j’ai eu l’impression que j’avais fait le tour du dubstep, que ça sonnait toujours un peu pareil. Il m’est vite apparu qu’il fallait que j’en sorte. Ça dépasse la simple question de style : c’est juste le son qui a changé, le style, ça reste le mien, point. En fait, j’ai voulu apprendre de nouvelles choses, essayer de nouveaux instruments. Me perdre pour me mettre au défi.



Comment a réagi Steve Goodman [Kode9, ndlr] à l’écoute de l’album ?

Dès le premier, il avait conscience que j’étais encore en train de «grandir». Il m’a toujours encouragée à être moi-même. Et il aurait eu du mal à me changer ! Vous savez, je viens à l’origine du milieu du punk metal hardcore. En Angleterre il y a une communauté très forte et, ça, ça a toujours compté beaucoup pour moi – les rencontres, les collaborations, partager des idées et, surtout, partager une même vision, une même morale, se sentir investi d’une même mission.


J’ai retrouvé ça chez Hyperdub qui est un label ultra-indépendant, avec ce même esprit DIY [«do it yourself», faites-le vous-même, ndlr]. «N’écoute personne, fais comme tu veux», c’est le mot d’ordre de Steve. Ça me va parfaitement, c’est pour ça que c’est mon mentor !



Est-ce que l’inspiration vous vient facilement ? Est-ce que vous voyez déjà vers quoi vous vous dirigez ensuite ?

Je n’aime pas trop planifier les choses – je préfère faire les choses à l’arrache, spontanément. Et ça m’aide vraiment parce que je n’ai pas envie d’être prévisible, attendue. C’est aussi pour ça que j’ai choisi le nom d’Ikonika – ça vient d’“iconoclaste”, d’une envie de démolir les conventions musicales. C’est ce qui doit faire de moi une productrice aussi bizarre, avec mes influences aussi lointaines que le R&B et le metalcore…


Pour mes compos, je suis adepte d’une écriture assez subconsciente, comme de l’écriture automatique. Comme un peintre, un dessinateur, je fais des esquisses que je range soigneusement et que j’oublie. Une fois que je réécoute le tout – des heures et des heures d’enregistrement –, je finis par me demander moi-même d’où tout ça a bien pu venir. J’ai même parfois du mal à croire que c’est moi qui a composé ça ! C’est une sensation assez étrange, assez unique aussi. C’est sûrement l’un des moments de créativité que je préfère – sans ces expérimentations, je crois que j’arrêterais ma carrière. Ensuite, je bricole le tout pour faire des morceaux – parfois il y aurait de quoi durer des heures sur un titre, d’autres fois je n’ai que de quoi faire un petit morceau.



Justement, pourquoi «Practice Beats» est-il aussi court [moins d’une minute] ? Je suis obligé de le passer en boucle mille fois !

(Rires) Hey, ça a marché ! Addictif, hein ? (Rires) Moi, pareil, je suis très fan de ces petits interludes que les artistes mettent dans leurs albums – jusqu’à, moi aussi, les jouer encore et encore. Bon, «Practice Beats», ça dit ce que c’est : des rythmiques d’entraînement, quand j’essayais de nouveaux sons. En travaillant dessus, je me suis dit qu’il serait sûrement ennuyeux comme titre entier. Mais je me suis imaginé que ce serait pas mal à jouer avec un groupe en live – si un jour j’ai une telle opportunité, peut-être que je le terminerai, d’accord ? (Rires)



Vous avez aussi monté un label, Hum + Buzz, avec Optimum…

Oui, c’était en 2010, quand Malcolm Chen et moi, on s’est mis à travailler ensemble. Tous les deux, on s’est dit «Voyons voir ce que c’est d’être de l’autre côté de la barrière !» Personnellement, je pense que ça fait partie de mon apprentissage, l’envie de connaître le métier sous tous ses aspects. D’abord, on avait sorti nos propres EP, et peu à peu on s’ouvre à d’autres artistes, Dro Carey et, il y a quelques jours, Marriage Proposal, un truc bien bizarre parce qu’on a des goûts bizarres, mais qui a du potentiel. Après, un label exige de passer beaucoup de temps sur la promo – alors que, moi-même, j’aime pas la promo, j’ai horreur qu’on me dise quoi écouter. Du coup, on n’en fait pas ou peu, on sort juste les trucs qu’on adore et puis c’est tout.



Est-ce qu’on aura la chance de vous voir jouer «Aerotropolis» live samedi ?

Hélas non ! Ce sera du DJing. L’album est sorti fin juillet, et j’y travaille beaucoup mais je n’aurais joué le live qu’une fois, au festival Incubate à Tilburg, en Hollande, ce mercredi soir. Comme je suis très perfectionniste, j’ai besoin de savoir comment il tourne d’abord, avant de le rejouer. Mais je prendrai soin d’incorporer dans mon mix du son représentatif de mes différentes productions, les miennes, celles avec des featurings importants, celles pour d’autres artistes. Je ne suis pas vraiment un DJ de fête mais j’ai plutôt une bonne expérience en tant que DJ de club, ma patte devrait se ressentir. • 


Recueilli par Sébastien Le Jeune

 

Écho #2: Plein les yeux, plein les oreilles

Des ponts, encore des ponts... Chez Écho à venir, c’est une vocation. L’an dernier, pont entre le passé et l’avenir des musiques électroniques orientées bass music, cette année, place au pont entre l’electro et les arts visuels. Le festival piloté par OrganPhantom avec Bassday démarre ce vendredi à l’Utopia avec un film emblématique de ces croisements, «Koyaanisqatsi» le pionnier, un film de 1983 produit par Coppola avec la musique de Philip Glass (à 20h, 4,50-6€), suivi d’un after gratuit au Fiacre à 22h avec tout le crew Bassday.

Samedi, gros programme : du gratuit aux Vivres de l’art pour commencer dès 16h30 avec cinq artistes dont YoggyOne, l’une des têtes de pont d’Eklektic Rec. au live aussi trépidant que sa musique est délicate. À 21h, on suivra La Supérette Ambulante et son caddie pour une traversée du... Pont Chaban, direction la Caserne Niel où on passe payant à 22h : 12€ en prévente (pass avec ciné 16€), 15€ sur place. Outre Ikonika, on y verra notamment Yosi Horigawa avec l’une des reines du visual art Florence To, et les hallucinants Frenchies de Plapla Pinky – un must see. Il est pas beau le futur ?    

Détails et vidéos sur www.echoavenir.fr

Photo : «Ikonika, ça vient de là, d’“iconoclaste”, d’une envie de démolir les conventions musicales.» © Georg Gatas

 

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