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Art, cherchez la femme : Audrey Pulvar en interview avant sa venue à l'institut Magrez ce mercredi soir PDF Imprimer Envoyer
Mercredi, 14 Décembre 2016 06:00

Dernière Nuit du Savoir de l’année ce soir à l’Institut culturel Bernard Magrez en compagnie d’une femme engagée, la journaliste et auteure Audrey Pulvar, autour des « représentations féminines dans l’art », le thème de son dernier livre. Entretien.

 

« La Femme » s’inscrit comme le premier de la collection « Le Monde en tableau » de Flammarion. Mais ce n’est pas juste un beau livre sur un aspect de l’histoire de l’art. Qu’avez-vous voulu montrer en l’écrivant ?
Ce qui frappe, dans l’art comme dans d’autres compartiments de la vie, c’est que les femmes ont toujours été traitées de manière mineure au fil des siècles, comme si elles étaient moins valables que leurs alter egos masculins. Et alors même que ça a changé depuis un petit siècle avec l’affirmation de femmes artistes, c’est maintenant le marché qui les infériorise : la cote d’une grande artiste comme Frida Kahlo par exemple est sans doute aux alentours de 10-20% de ce qu’elle représenterait si elle avait été un homme. Elles sont très peu nombreuses à avoir droit à de grandes expositions rétrospectives et, en librairie, si vous regardez bien, si vous trouvez 10 ouvrages sur Van Gogh vous en trouverez un demi sur Annette Messager…

Est-ce un livre résolument féministe ou un simple constat un peu amer ?
Les deux ! (Rire) Il est féministe – de toute façon j’applique en général une lecture féministe de la société. Mais il y a aussi ce constat attristé, mélancolique : dans l’art, de Titien à nos jours, les femmes ont rarement été représentées à leur avantage, surtout on n’était loin de les faire figurer dans toutes leurs dimensions. Il y a un certain progrès lorsque l’impressionnisme, le pointillisme, succèdent au réalisme : la quête de lumière, de couleur, de geste qui anime les artistes met une certaine distance avec le sujet – à 80% des femmes. Ce qui restitue aux femmes une fragilité, une humanité qu’elles n’avaient pas dans l’art réaliste et classique où elles incarnaient bien souvent des vierges ou des divinités.

La véritable évolution est survenue au début du siècle dernier avec l’incursion des femmes dans l’art. Il y en avait toujours eu… un peu, des Camille Claudel, Eva Gonzalès… Mais des artistes comme Sonia Delaunay ou Sophie Taeuber-Arp vont prendre le pouvoir sur leur image et donner de la femme une représentation plus fine, plus complexe. Quitte à se réattribuer des canons esthétiques auparavant réservés aux hommes, voire se parer d’attributs masculins. Le XXe siècle a été un progrès dans ce sens, jusqu’au mouvement des Guerrilla Girls. Ce qui ne veut pas dire qu’il n’y a plus rien à faire, au contraire. Les femmes doivent continuer à créer et à se battre.

Vous évoquez un combat et, dans votre avant-propos, vous épinglez les agences de style d’aujourd’hui – pourtant souvent dirigées par des femmes. Ce combat, n’est-ce pas un éternel recommencement ?
Cela appelle deux réponses. D’abord toutes les femmes ne sont pas féministes ! Ensuite, la question centrale, même quand on parle de représentation de la femme, c’est celle de l’égalité homme-femme. Dans ce domaine, même si on avance, si on gagne du terrain, rien n’est jamais gagné et dès qu’on arrête le combat, on recule. Que ce soit dans l’art, au cinéma, dans la pub, dans les bureaux de style, il faut que les femmes soient traitées sur un pied d’égalité avec les hommes, qu’on les représente telles qu’elles sont, dans toutes leurs contradictions, toutes leurs aspirations, pas de façon chosifiée ou infériorisée. •

Recueilli par Sébastien Le Jeune

Rencontre ce mercredi soir, 20h, 12€ (6€ étudiants, chômeurs…), dégustation incluse. Tél. 05 56 81 72 77 ou www.institut-bernard-magrez.com

À lire sur le même thème, notre interview de l’artiste Judy Chicago lors de sa venue au CAPC (10 mars 2016)

Photo : Audrey Pulvar : « Les femmes doivent continuer à créer et à se battre » © Astrid di Crollalanza

 

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